Que l’auteur voyage autour de sa chambre (Xavier de Maistre) ou s’évade en pensée en des contrées lointaines, l’enfermement semble avoir joué un rôle dans l’élaboration des récits de voyages immobiles. Parfois, un simple bout de ciel bleu aperçu « par-dessus le toit » permet à l’auteur (Paul Verlaine) d’échapper à sa condition. Les jours de navigation sans vent donnent lieu alternativement à des « rien à signaler » journaliers ou au contraire à des grandes envolées méditatives (Journal aux Indes orientales de Robert Challe).
De son exil anglais, le poète Charles d’Orléans regardait « vers le païs de France » et sa « doulce plaisance ». Que penser de Du Bellay, harassé de tâches domestiques à la cour de son oncle cardinal, qui prend à rebours le mythe odysséen et rêve de rester immobile chez lui ? Parmi tous les arpenteurs d’imaginaire et d’inconnu, les voyageurs immobiles choisissent leur parcours, mais aussi les mots et les formes pour l’exprimer....