L’ENCYCLOPEDIA OF EXPLORATION

L’ENCYCLOPEDIA OF EXPLORATION
DE RAYMOND JOHN HOWGEGO

 

HOWGEGO Raymond John, Encyclopedia of Exploration, Edit. Hordern House, Potts Point NSW 2011 (Australie) 2001 - 2008. 4 volumes. Encyclopedia of exploration to 1800, 1168 p., index. ISBN 1-875567-36-4. 1800 to 1850, 682 p., index, ISBN 1-875567-39-9.  1850 to 1949 The oceans, islands and polar regions, 713 p., Index, ISBN 1-875567-41-0 Continental exploration, 1041 p. Index, ISBN 9781875567423. Set ISBN 9781875567447

 

 Hordern House, un temple mythique du livre ancien et de l’estampe sur les voyages vient de publier en mars à Sydney le quatrième et dernier volume de l’Encyclopedia of Exploration, sept ans après le premier tome. Un chiffre bénéfique. C’est un dictionnaire biographique mais pas seulement. Un monument que son auteur Raymond John Howgego, chercheur indépendant londonien et grand voyageur, membre du respectable Council of The Hakluyt Society a élaboré au cours d’une quinzaine d’années de recherches. Son ambition était d’en faire une référence exhaustive sur l’histoire de la découverte de la Terre et de son exploration. Le résultat de son pari tenu pèse dix kilos d’histoire et d’aventure contées par le détail. Il faut bien sûr être anglophone pour apprécier cette somme, mais elle n’a pas d’équivalent nulle part.

Un lecteur français est conduit à suspecter a priori la capacité d’un auteur anglo-saxon de discourir avec impartialité sur la contribution des pays latins à la découverte du monde, sur leur part d’un héritage historique qui leur doit beaucoup. Comme pour se faire pardonner par avance, l’éditeur a placé d’emblée son encyclopédie sous le patronage de Jacques Cartier, en reproduisant sur la jaquette du premier volume le tableau de Théodore Gudin imaginant les Français remontant le Saint-Laurent en 1535. Je faisais remarquer naguère à Ray Howgego la rareté des références bibliographiques françaises dans le premier volume de cet ouvrage à vocation universelle qui se réfère la plupart du temps à des sources anglo-saxonnes et le cas échéant ibériques ou germaniques. Les historiens maritimes français sont même plutôt mal accueillis sur les chasses gardées anglophones. L’Encyclopedia traite les sujets français en citant au moins une partie de notre bibliographie nationale, et consacre convenablement une demi-page à Jean-Baptiste d’Après de Mannevillette, l’un des plus brillants officiers de la Compagnie des Indes dont il était l’hydrographe novateur. Oui mais, rapportant bien la confiance et l’estime réciproque, la connivence intellectuelle et professionnelle qui le liaient à Alexander Dalrymple, elle la qualifie du terme réducteur « d’assistance » alors que le Britannique vouait en réalité une admiration sans borne à son homologue français. J’aurais aimé cette citation : « Les cartes pour la mer de l’Inde par Monsieur d’Après de Mannevillette (…) dépassent tous les documents de cette sorte produits en Europe».

Il est vrai que l’Encyclopedie ne fait pas la part beaucoup plus belle au grand Dalrymple, résumé lui aussi en une demi-page. Je suis tenté de faire à Ray Howgego le reproche perfectionniste d’avoir limité ses biographies à la récapitulation des voyages en effleurant l’apport de quelques navigateurs inventifs à l’art subtil de la navigation hauturière, sans s’étendre non plus aux sédentaires dont la contribution à la découverte du monde a été déterminante. Trois lignes résument l’invention du « quartier anglais », si populaire pendant deux siècles, dans les deux pages de la biographie de John Davis. Le cercle de Jean-Charles de Borda, le meilleur instrument de mesures angulaires jamais offert aux navigateurs est ignoré par les quatorze petites lignes consacrées à l’un des « officiers savants » au siècle de la longitude. Beaucoup d’acteurs ont joué des rôles majeurs dans l’exploration du monde sans être ni des marins ni des explorateurs. Comme l’incontournable Henry the Navigator, l’abbé de La Caille et La Condamine sont repêchés grâce à leurs voyages scientifiques, parmi les rares à échapper au rejet systématique qui a éliminé Gerhard Kremer dont le canevas de projection des cartes marines a accompagné l’expansion du monde sous son pseudonyme flamboyant de Mercator jusqu’à l’âge de la carte électronique. Cette encyclopédie n’est pas une histoire des sciences et son auteur ne le prétend pas. Regrettons le furtivement tant l’aventure de la navigation hauturière – le premier et longtemps unique vecteur d’expansion - est essentiellement pluridisciplinaire. L’objet de cette publication est assez vaste pour que nous ne boudions pas notre plaisir.

Je reconnais bien volontiers que Ray Howgego a atteint le but qu’il s’était fixé. Une recherche soupçonneuse des oublis que l’on pouvait attendre d’une démarche aussi démesurée ne m’a pas permis de prendre un Britannique en flagrant délit de négligence envers la culture continentale. En louvoyant parmi 4500 entrées majeures et près de 60000 références bibliographiques, on peut même retrouver les héros secondaires que la grande histoire a un peu négligés. Heitor Homem et Diogo Lopes sont bien là, hébergés dans l’entrée consacrée à leur capitaine Afonso Gonçalves Baldaya. Ces deux jeunes fidalgos portugais se sont aventurés les premiers sur la terre des Maures au sud du cap Bojador enfin vaincu, juchés sur des chevaux amenés tout exprès, comme Neil Amstrong et Buzz Aldrin sur leur véhicule lunaire. Si l’on n’est pas familier de l’histoire des découvertes pour naviguer dans l’Encyclopedia, l’index onomastique très commode d’emploi en ouvre toutes les richesses. Les îles et terres remarquables ont chacune une entrée récapitulative de leur apparition dans l’histoire du monde.

Je garantis aux utilisateurs potentiels que cet ouvrage exceptionnel trouvera une place irremplaçable dans leur bibliothèque de travail. Il les séduira par sa clarté, due au choix intelligent de consacrer une entrée spécifique à chacun des voyages des explorateurs. Cinq entrées pour Columbus Christopher, plus une bibliographie de 5 pages. Une entrée pour Bartolomeo, le frère et une autre pour Diego, le fils. Deux entrées sur 5 pages pour Dumont d’Urville, mais une aussi pour Joseph-Paul Gaimard, son naturaliste. Admettant de bon gré des améliorations possibles, et parce que l’ère informatique périme à court terme tout ouvrage encyclopédique imprimé, l’auteur et l’éditeur invitent cordialement leurs lecteurs à les rejoindre sur le site Internet de l’Encyclopedia of Exploration. À contribuer à ses corrections et à sa mise à jour, pour en faire en quelque sorte à terme, un ouvrage collectif universel. En échange de cette collaboration, des documents de mise à jour seront publiés périodiquement et gratuitement sur le site.

Rendez-vous donc sur www.explorersencyclopedia.com. Et sur www.hordern.com pour mieux connaître cette fabuleuse Hordern   House.

François Bellec

Référence électronique

François BELLEC, « L’ENCYCLOPEDIA OF EXPLORATION », Astrolabe - ISSN 2102-538X [En ligne], Novembre / Décembre 2008, mis en ligne le 03/08/2018, URL : https://crlv.org/articles/lencyclopedia-of-exploration