L’ÉGYPTE DE GIOVANNI BELZONI

L’ÉGYPTE DE GIOVANNI BELZONI
Une réédition des Voyages en Égypte et en Nubie

image002_46.jpg
 

C’est en 1821 qu’à Paris, chez La Librairie Française et Étrangère de Galignani, Giovanni Belzoni publia la traduction française de la relation de ses voyages en Égypte et en Nubie. Aujourd’hui, la collection Texto des éditions Tallandier nous propose une très belle réédition en poche de ces voyages, précédé par un long et approfondi essai d’Alberto Siliotti, journaliste et spécialiste d’égyptologie.

Né à Padoue en 1778, Giovanni Belzoni habita longtemps à Londres, avant de se rendre, en 1815, pour la première fois en Égypte, dans ce pays qui le charma et auquel il dédia 4 ans de recherches passionnées.

Dans son livre, Belzoni décrivait soigneusement, dans un style clair et linéaire, ses aventures et ses découvertes pendant son séjour égyptien, se défendant parfois sur un ton extrêmement polémique des calomnies dont il avait été victime. De ce récit passionnant émergeait une image de l’Égypte de l’époque, vivante et fourmillante d’informations. (p. 43)

Le premier livre est consacré au premier voyage en Égypte et en Nubie, du 30 juin au 15 décembre 1816, et relate, entre autres, la récupération du monolithe du buste de Ramsès II, à l’époque désigné sous le nom de « jeune Memnon ». En quinze jours, Belzoni réussit à déplacer la statue de deux milles, de son emplacement d’origine jusqu’à la rive du Nil, en utilisant, sans le savoir, une méthode similaire à celle des Égyptiens de l’Antiquité, tout en déplaçant le monolithe grâce à la seule aide de leviers, de rouleaux et de cordes en fibres de palmier. Le « jeune Memnon » arriva à Alexandrie le 10 janvier 1816 et rejoignit Londres l’année suivante, pour être exposé au British Museum.

Le récit du deuxième voyage couvre la période entre le 20 février et le 21 décembre 1817 ; il s’agit de l’époque des trois plus grandes découvertes de Belzoni : l’entrée du temple d’Abu Simbel, cachée par le sable depuis plusieurs siècles, l’ouverture du tombeau de Sethi Ier, dans la Vallée des Rois, et la découverte de l’entrée de la pyramide de Khephren à Gizeh.

Belzoni entra dans le temple d’Abu Simbel le 1er août 1817, en découvrant à l’intérieur une température touchant les 50° :

À notre premier coup d’œil nous fûmes étonnés de l’immensité du souterrain ; mais notre surprise fut extrême quand nous nous trouvâmes entourés d’objets d’art magnifiques de toute espèce, de peintures, de sculptures, de figures colossales etc. Nous entrâmes d’abord dans un vestibule de cinquante-sept pieds de long sur cinquante-deux de large, soutenu par une colonnade de piliers carrés qui conduisent de la première porte à celle du sekos. […] Dans la seconde salle où nous arrivâmes ensuite […] les murs étaient également couverts de beaux hiéroglyphes bien conservés ; quatre piliers d’environ quatre pieds carrés soutenaient le plafond. Au bout de cette salle on entrait dans une autre moins longue, mais qui avait aussi trente-sept pieds de large ; et de là on passait au sanctuaire, d’où une porte conduisait à des salles plus petites, situées dans la même direction que le sanctuaire, et ayant en étendue huit pieds sur sept. Quant au sanctuaire même, cette partie du temple, long de vingt-trois pieds et large de douze, elle a en outre un piédestal, et à l’extrémité s’élèvent quatre figures colossales, dont les têtes n’ont heureusement pas été endommagées. (p. 304-305)

Du point de vue historique et scientifique, l’ouverture du temple d’Abu Simbel représente une des découvertes les plus importantes de l’archéologie égyptienne ; cependant, dans l’optique de l’époque de Belzoni, cela ne rapportait pas d’argent, car le temple était vide de tout trésor. Belzoni se prépara, donc, à reprendre les fouilles dans la Vallée des Rois, où il avait déjà travaillé l’année précédente, et après l’ouverture de trois tombes mineures, voilà que le 18 octobre 1817, Belzoni découvrit une nouvelle tombe intacte, celle de Séthi Ier, père de Ramsès II :

Elle était ornée de peintures polychromes et d’une série de bas-reliefs tous remarquables. Dans la chambre funéraire trônait un splendide sarcophage en albâtre sur lequel avaient été gravés des extraits du Livre des Portes. […] Le sarcophage refusé […] par le British Museum qui considérait son coût trop élevé, fut finalement acquis par sir John Soane qui l’installa dans son musée privé à Lincoln’s Inn Field (Londres) où il se trouve encore. […]  [Belzoni] décida ensuite de procéder, avec l’aide du médecin siennois Alessandro Ricci, au relevé des principales peintures et à l’exécution de calques des bas-reliefs – il y en avait plus de huit cent. (p. 31-32)

Ces dessins serviront à Belzoni pour préparer et organiser la grande exposition qui se déroula en 1821 à l’Egyptian Hall de Piccadilly à Londres et qui lui apportera un énorme succès.

Rentré au Caire, pendant que Ricci exécutait les dessins, Belzoni commença à réfléchir à une des grandes énigmes de l’archéologie égyptienne, l’emplacement de l’entrée de la pyramide de Khephren : après des études sur la pyramide de Khéops et sur son entrée, Belzoni réussit enfin, le 2 mars 1818, à pénétrer dans la pyramide, tout en s’apercevant quand même d’avoir été précédé, environ six cent auparavant, par des voleurs.

Le troisième livre de voyages recueille les souvenirs de trois expéditions que Belzoni acheva entre le 28 avril 1818 et le 18 février 1819. D’abord, le voyageur démontra l’exactitude des voyages du minéralogiste français Caillaud, qui avait vu les ruines du port de Bérénice, que Ptolémée II Philadelphe avait fait construire sur la mer Rouge : suivant le récit de voyage de Caillaud, Belzoni trouva ces ruines à la fin d’un voyage épuisant dans le désert. Ensuite, il fut chargé de récupérer un obélisque qui gisait sur l’île de Philae et qui sera destiné à jouer un rôle aussi important que la pierre de Rosette, dans la recherche du déchiffrement des hiéroglyphes. Enfin, en mai 1819, Belzoni chercha à rejoindre l’oasis de Jupiter Amon, siège du célèbre oracle consulté par Alexandre le Grand et Crésus. Aujourd’hui on reconnaît dans l’oasis de Siwa l’ancien emplacement de l’oracle. Belzoni arriva à l’oasis de Bahariya et, d’après ses cartes, crut qu’il s’agissait du même lieu. Rentré au Caire à la fin de juin, il partit définitivement pour l’Europe en septembre.

L’histoire de Belzoni se termine d’une manière aussi aventureuse que sa vie : parti en septembre 1823 pour l’Afrique, il visait à découvrir la ville mythique de Tombouctou, mais, arrivé à Gwato (en Niger), il fut frappé par une forte crise intestinale et mourut le 3 décembre 1823.

Ses récits de voyage furent publiés en 1821 en anglais à Londres, chez Murray, et obtinrent un grand succès, à tel point qu’ils furent traduits dans les années suivantes en français, allemand et italien.

Cette nouvelle réédition française nous propose, à la fin, le journal de voyage de Sarah Belzoni, l’épouse du voyageur, qui avait parcouru la Terre Sainte en 1818 et avait même réussi à visiter la mosquée d’Omar à Jérusalem (interdite aux femmes et aux non-musulmans), déguisée en marchand arabe. Le volume se termine par un vaste apparat de notes et par une bibliographie sélectionnée.

Alessandra Grillo

Quatrième de couverture

Rien ne prédestinait Giovanni Belzoni (1778-1823) à devenir le pionnier de l’égyptologie. Fils de barbier, devenu moine, il émigre en Angleterre, s’exhibe dans les foires, voyage en Europe et échoue en Égypte. En 1815, une mission presque impossible lui est confiée : descendre le Nil jusqu’à Thèbes et ramener un buste colossal de pharaon. On ignore alors qu’il s’agit de Ramsès II. Contre toute attente, il réussit, et poursuit ses explorations au cours de trois voyages. Il sera le premier à entrer dans le grand temple d’Abou Simbel, découvrira les tombes royales de la vallée des rois et ouvrira la pyramide de Képhren à Gizeh. Voyages en Égypte et en Nubie est le récit de ses découvertes et aventures.