Amerigo Vespucci naquit à Florence en 1454 ; il disparut en 1512 : il est le contemporain presque exact de Christophe Colomb (Gênes, 1451-1506), dont, pour certains, il tenta d’usurper la gloire. Protégé des Médicis, il fit un court séjour en France, puis s’installa à Séville au service d’un armateur. C’est là qu’il connut vraisemblablement Colomb. Vespucci s’occupe de l’armement du deuxième voyage de Colomb en 1493, mais il ne voyage pas. Dans ces années, on pense que Colomb a découvert des îles situées à l’Est de Cipangu, ces contrées d’Asie extrême-orientale signalées par les voyageurs occidentaux du Moyen Âge, dont Marco Polo. Vespucci pense qu’il y a autre chose : un continent inconnu ? En 1497, il participe au voyage d’Oreda, le premier de trois ou quatre sur lesquels il embarqua, parfois comme second sur les navires. Le premier voyage le mène le long du golfe du Mexique, peut-être jusqu’en Floride et à la baie de la Chesapeake ; le deuxième le conduit du Venezuela (Petite Venise dont les huttes sur pilotis évoquent la cité italienne) aux côtes du Brésil qu’il va décrire avant Cabral (« découvreur » du Brésil en 1500) ; le troisième, financé par le Portugal, permet à Vespucci de pénétrer un peu à l’intérieur du Brésil, de connaître les mœurs variées des populations (dont l’anthrophagie rituelle des Tupinambas) et de créer quelques mythes sud-américains récurrents ensuite (les géants et les amazones) ; il va aussi très au Sud, vers l’Argentine actuelle (rio de la Plata) et les Malouines à la recherche d’un passage vers l’Ouest (l’Asie, toujours….); le quatrième qui explore le nord du Brésil (Bahia) est un échec. Les journaux de bord de Christophe Colomb seront connus seulement au XIXe siècle. Vespucci publie aussitôt les relations de ses voyages : une lettre à son protecteur Pier Francesco de Médicis, le Mundus novus et la Lettera. Ses textes, contrairement aux journaux du très austère Colomb, s’intéressent au realia et aux mœurs locales, aux individus des deux sexes… Le Mundus novus eut un succès extraordinaire ; cette plaquette publiée en 1504 fut immédiatement traduite et publiée dans les diverses langues de l’Europe : italien, français, tchèque, etc. Il témoignait que c’était un « nouveau monde », et non quelques îles, qui avait été découvert. Le cartographe Waldseemulller en voit un exemplaire à Paris et décide de publier à Saint-Dié, en Lorraine, une nouvelle édition illustrée de la Cosmographie de Ptolémée (1507), il orne cette édition d’une nouvelle carte un monde intégrant les nouvelles découvertes auxquelles il donne le nom d’America, en l’honneur de l’auteur du Mundus novus. Sur la carte, il ajoute au portrait de Ptolémée celui de Vespucci, accompagné d’une réduction curieuse de la carte, où apparaît pour la première fois le contour de l’Amérique, dont la côte Pacifique qui était alors inconnue des Européens et qu’il situe à l’Est du Japon et de la Chine du Nord. L’iconographie du Mundus novus témoigne que ces découvertes sont attribuées non aux voyageurs, mais à leur mandants, en particulier à Ferdinand d’Aragon, et que la représentation des nobles sauvages, qui aura tant de succès ensuite n’en est pas absente, malgré ou grâce aux rites anthropophages, au goût de la guerre et à l’érotisme de ces populations dénudées comme au Paradis.
Le texte
Le Nouveau Monde. Les voyages d’Amerigo Vespucci (1497-1504). Traduction, introduction et notes de Jean-Paul Duviols, Paris, Éditions Chandeigne, Paris, 2005.
Etudes
- Alexandre de Humboldt, Examen critique de l'histoire, de la géographie du Nouveau Continent et des progrès de l'astronomie au quinzième et au seizième siècles, Paris, 1836-1839 (volumes IV et V consacrés à Vespucci).
- Henry Vignaud, Americ Vespuce (1451-1512), Paris, 1917.
- Stephan Zweig, Amerigo, (trad. française :1992).
- Luciano Formisano, Amerigo Vespucci, Lettere de viaggio , Milano, Mondadori, 1985.
- Roberto Levillier, América la bien llamada, Buenos Aires, 1948