La Djighitovka, ou voltige cosaque, est une voltige très différente de celle que nous connaissons puisqu'elle ne se pratique pas en cercle mais en ligne droite et au galop de charge. Ceux qui la pratiquent la disent d'inspiration guerrière et exclusivement composé de figures utiles au combat. Jean-Louis Gouraud en doute. En effet, les meilleurs cavaliers du monde selon Napoléon ont su utiliser au mieux les qualités du cheval - sa maniabilité, sa vitesse, sa mobilité - pour porter à un niveau de quasi-perfection la technique militaire du harcèlement, mais ils ne se livraient pas sur le champ de bataille à de « brillantes contorsions (…) certes spectaculaires mais peu justifiables sur le plan militaire » telles que desseller et resseller son cheval en restant au galop, galoper debout sur sa selle tout en utilisant son arme, sauter un obstacle debout sur sa selle, s’assoir à l’envers sur sa selle, tourné vers la croupe du cheval et tirer un coup de feu, se jeter sous le ventre de son cheval pour remonter en selle de l’autre côté, voire galoper en faisant la chandelle sur le pommeau de sa selle… Sans vouloir à tout prix démythifier la Djighitovka, Jean-Louis Gouraud propose une analyse linguistique et historique d’une pratique d’inspiration guerrière devenue une chorégraphie autour du cheval, composante essentielle du cirque russe. Il fait de même avec une autre exhibition équestre, pratiquée en Afrique du Nord, la Fantasia. La Fantasia se joue sur une courte distance et consiste à lancer, départ arrêté, son cheval à vive allure, puis à lui demander une accélération foudroyante pour l’arrêter net, en bout de course, aux pieds des spectateurs médusés. L’exercice peut s’agrémenter de « gesticulations spectaculaires » avec un fusil à poudre, un sabre, voire les deux. Pratiquée de manière individuelle ou en sorba - groupe de cavaliers -, la Fantasia est un jeu viril par excellence, traditionnellement réservé aux hommes. Cependant, des équipes féminines commencent à percer au Maroc. Ce pays encourage ces manifestations organisées le plus souvent lors des moussems - pèlerinages et célébrations du souvenir de saints locaux - car elles favorisent le maintien de traditions qui représentent un puissant attrait touristique et surtout garantissent la pérennité de l’élevage, donc la sauvegarde, du cheval barbe ou arabebarbe. Selon les sources, la Fantasia est considérée comme une fuite simulée, l’illustration ludique de toute la tactique militaire bédouine fondée sur la charge et le repli brusque, ou comme un art théomartial, simulacre de combats dangereux et chargés d’importantes valeurs spirituelles. Quoiqu’il en soit, la Fantasia, comme la Djighitovka, privilégie le spectacle à l'art de la guerre. Ce qui fait dire, non sans humour, à Jean-Louis Gouraud : « Djighitovka et Fantasia, même combat. » A moins qu’il n’existe un lien plus lointain…
Référencé dans la conférence : LE CHEVAL ET LA GLOIRE DANS LE SPECTACLE VIVANT
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