Sur les biologistes de l'expédition Baudin.

Conférencier / conférencière

L’expédition du capitaine Nicolas Baudin quitta Le Havre en 1800, au milieu d’un enthousiasme populaire qui témoigne de l’importance que l’on accordait alors en Europe à ces équipées lointaines. Disputes, malentendus, dissensions et forte mortalité en on fait une expédition maudite et de Baudin un bouc émissaire très utile. Pourtant cette expédition fut l’une des plus importantes au tournant des deux siècles. Né en 1754, Baudin fut d’abord au service de la Marine royale, puis de la navigation marchande : il lui en resta le goût de rentabiliser ses voyages. Il avait un fort goût pour les sciences naturelles et la botanique. De 1786 à 1796, il collectionne les plantes et les graines pour l’empereur Joseph II et son parc de Schönbrunn. Il a une réputation de botaniste récolteur. Engagé en 1796 par le Muséum, ex-Jardin du Roi, il dirige une expédition botanique aux Antilles qui le met en évidence. Bonaparte, rénovateur de l’Institut, le charge avec des instructions venues de cette institution et son ami Jussieu, d’une expédition en Australie pour en reconnaître les côtes, la faune, la flore et les populations. Sur deux navires, _ le Géographe _ et _ le Naturaliste_ , il embarque vingt-deux scientifiques, plus deux secrètement. Très rapidement, les conflits entre les scientifiques se développent : jeunes et souvent peu compétents, ils supportent mal les 1235 jours du voyage. En 1801, à l’escale de l’Île de France (Maurice), ils ne sont plus que quatorze, neuf au départ de Syney (Port-Jackson,) et sept au retour en France. Trois d’entre ces derniers mourront, dans les années suivantes, de maladies liées au voyage. L’expédition a un but cartographique et hydrographique premier en concurrence avec l’Anglais Flinders qui navigue dans les mêmes eaux : les scientifiques font peu de séjour à terre, moins de cent jours ; ils s’en plaignent. Levillain, est élève zoologiste, il a 27 ans, il meurt à l’Île de France en 1801 : ancien compagnon de Baudin aux Antilles, c’est un collecteur zélé, il rédige un journal, malheureusement conservé incomplet où il laisse transparaître un esprit inquiet et mélancolique. Mauger est un botaniste de 42 ans, lui aussi ancien du voyage aux Antilles ; il travaillait au Muséum et mourut en Tasmanie (1802). Mais le plus important et le plus célèbre est François Péron, le zoologiste narrateur du voyage : personnage complexe et paradoxal, il est jeune et a fait des études de médecine à Paris où il a connu Cuvier et Lamarck. À la suite d’une déception amoureuse, il embarque avec Baudin qu’il admire au début. Son but premier est de pratiquer l’anthropologie, c’est-à-dire au sens de l’époque la médecine comparée. Mais il va devenir élève zoologiste et se spécialisera dans l’anatomie animale comparée et dans les invertébrés. Il mourut peu après son retour en France, laissant quinze articles sur l’expédition et sa contribution aux dessins de son compagnon Lesueur. Ayant rompu rapidement avec Baudin mort à l’Île de France, très ambitieux, Péron donna une version du voyage fortement critique à l’égard du chef d’expédition. Des quatre botanistes, deux moururent pendant le voyage. L’Allemand Riedle, « jardinier », rédigea en français un journal vivant et plein d’anecdotes. La moisson fut considérable : l’herbier de 1500 espèces est conservé aujourd’hui pour partie à Florence et surtout au Muséum, où plus de 1100 échantillons ont été jusqu’à présent retrouvés par le conférencier. Les rapports de Baudin avec les savants furent toujours difficiles. Dès l’escale aller à l’Île de France, certains désertèrent et revinrent en France où ils répandirent des critiques contre Baudin – accusation de « pacotilles » en particulier, c’est-à-dire de transport illégal de marchandises sur les navires. Au retour, Péron récrivit l’histoire de l’expédition en occultant totalement Baudin. Sa narration publiée en 1807 est un récit très tendancieux. Aujourd’hui, la recherche s’emploie à réhabiliter l’œuvre de Baudin.

Mots-clés : encyclopédie. sciences naturelles. personnel scientifique.

Référencé dans la conférence : Relations savantes : voyages et discours scientifique à l'Âge classique
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