Résumé
Cette rencontre avec Lorand Gaspar commence par une brève présentation de Daniel Lançon, son commentateur et ami, présentation qui met l’accent sur le « devenir poète et écrivain » de celui qui, toute sa vie durant, fut médecin. Une vie passée entre plusieurs pays tels la Hongrie, la France, la Palestine, la Tunisie, la Grèce et entre plusieurs langues puisque fidèle au conseil paternel, Lorand Gaspar est un polyglotte accompli.
C’est sur le détail de cette existence faite de déplacements mais surtout de séjours prolongés, que le poète et médecin revient longuement, égrenant quelques-uns de ses souvenirs : les relations amicales entretenues avec les Bédouins qu’il accompagna parfois au désert pour quelques semaines, ou avec les habitants de Patmos qu’il fréquenta plusieurs années, ou sa rencontre et l’amitié avec Georges Séféris qui fut son intercesseur dans son apprentissage de la culture grecque antique, chrétienne et moderne. Finalement, l’évocation de ces amitiés suggèrent que sa préférence à la poésie – qui transcende une répartition générique trop stricte excluant par exemple la prose – est liée au fait qu’elle est du côté du séjour plus que du voyage : le lieu de l’écriture est dans le battement du vivre au quotidien plutôt que dans l’aventure de l’ailleurs.
Après que Lorand Gaspar a lu un extrait de Sol absolu – qu’il définit comme un poème épique – et un autre de Patmos, à tonalité lyrique à la nuance près qu’ils illustrent la distinction rappelée par l’auteur entre sentiment et émotion, la discussion s’engage sur sa curiosité pour l’histoire des lieux où il a habité. La petite autobiographie liminaire à Sol absolu se complète ici de plusieurs anecdotes notamment sur le site de qumrân sur les bords de la mer morte. Les aspects épiques et lyriques trouvent alors leur réunion dans la question posée par Lorand Gaspar : « Qu’y a-t-il dans ma composition qui pût entrer en résonance avec les vibrations du lieu ? »
Elle éclaire également l’absence dans l’œuvre du poète des sentiments de nostalgie ou de mélancolie dans l’évocation des lieux pourtant quittés. Alors que la tradition des récits, des carnets ou de la poésie de voyage accorde une grande place au discours de la perte, Gaspar lui préfère un discours de la présence, ce qu’il commente sobrement en deux mots : « accepter plutôt que renoncer ». Reprenant la formule de « l’esprit nomade » proposée par son critique, il développe cette idée du danger de prendre racine et du salut apporté par la transhumance qui soutient l’écriture. Dans le cours de la discussion et répondant à plusieurs questions sur sa relation au désert et sa relation à la foi, il reprend cette même idée et la qualifie cette fois de philosophie du continu, où n’existe ni ici ni là-bas, ni haut ni bas, mais une expérience intérieure qui permet de comprendre ce que c’est qu’être un vivant.
Eléments bibliographiques
Poésie
Le Quatrième état de la matière, Paris, Flammarion, 1966.
Gisements, Paris, Flammarion, 1968.
Sol absolu, Paris, Gallimard, 1972.
Corps corrosifs, Montpellier, Fata Morgana, 1978.
Égée suivi de Judée, Paris, Gallimard, 1980.
Amandiers, estampilles de Hajdu, Gentilly, Hofer, 1980.
Genèse, eaux-fortes de Zao Wou-Ki, Losne, Thierry Bouchard, 1981.
Sol absolu, Corps corrosifs et autres textes, avec un essai d’autobiographie, Paris, Gallimard, 1982, (Coll : « Poésie »).
Séfar, illustration de Árpád Szénes, Montpellier, Fata Morgana, 1983.
Patmos, lavis de T’ang, Pully, P.A.P., 1989.
La Maison près de la mer, lavis de T’ang, Losne, Thierry Bouchard, 1991.
La Maison près de la mer, lavis de T’ang, Pully, P.A.P., 1992.
Égée Judée, suivi d’extraits de Feuilles d’observation et de La Maison près de la mer, Paris, Gallimard, 1993 (Coll : « Poésie »).
Amandiers, avec des lavis de T’ang, Lausanne, P.A.P., 1996.
Patmos et autres poèmes, Paris, Gallimard, 2001.
Prose
Histoire de la Palestine, Paris, Maspéro, 1968. Réédition augmentée en 1978.
Palestine année zéro, Paris, Maspéro, 1970.
Approche de la parole, frontispice d’Henri Michaux, Paris, Gallimard, 1978.
Sentes, frontispice de Claude Ballaré, Tunis, Service Culturel de l’Ambassade de France, 1979. (comprend trois études : sur l’image, René Char et Saint John Perse).
Journaux de voyages, encres de Zao Wou-Ki, Paris, Piquier/Le Calligraphe, 1985.
Feuilles d’observation, Paris, Gallimard, 1986. (nouvelle édition 1994).
Battements, Châteauroux, L’Ire des Vents, 1987.
Carnet de Patmos, avec des photographies de l’auteur, Cognac, Le Temps qu’il fait, 1991.
Pour accompagner Árpád Szénes, frontispice de l’artiste, S.l., M.C.C., 1993.
Apprentissage, Paris, Deyrolle, 1994.
Feuilles d’observation, Tunis, Cérès éditions, 1994 (reprise de l’édition française).
Arabie heureuse, réédition revue et corrigée de Journaux de voyages, augmenté de trois nouveaux récits, Paris, Deyrolle, 1997.
Carnets de Jérusalem, avec des photographies de l’auteur, Cognac, Le Temps qu’il fait, 1997.
Correspondance. 1966-1978. Georges Perros, Lorand Gaspar, Rennes, La Part commune, 2001. Avec préface de Lorand Gaspar (reprise, NRF, 1988).
"Rêverie sur l'apparence nommée horizon", Poésie 96 n°62, avril 1996.
"La Désert vivant", Bédarieux : Rémanences, n°6, avril 1996, p.277-279. Réflexion.
"Approches d'un désert vivant", Dédale, 1998, n°7-8.
Lorand Gaspar, photographe du voyage
Photographies publiées (principales sources)
L'Arrière-pays, Yves Bonnefoy. 1 cliché ill. le texte p. 48-49.
Port-des-Singes, n°5, 1977. 8 clichés avec un poème.
Espaces de Lorand Gaspar, Marseille : Sud, 1983. Premier volume critique consacré à l'auteur.
Meltemi, douze photographies originales accompagnées d'un texte de J. Lacarrière sur Lorand Gaspar, Editions Garde vue, Tunis, 1983.
Lorand Gaspar, Espaces. Catalogue de l'exposition à la BM de Marseille, décembre 1984-janvier 1985. 15 clichés.
Egée-Judée. Numéro spécial Lorand Gaspar, Aporie, n°9, 1988. 2 clichés.
Lorand Gaspar. Collections Musée Niepce. 16 juin-10 septembre 1989. Chalôns-sur-Saône. 13 clichés.
Carnet de Patmos. Textes & Photographies. Editions Le Temps qu'il fait, 1991. 12 clichés.
"Champs magnétiques", Poésie 92, n°44, octobre 1992, 5 clichés acccompagnant un dossier sur l'auteur.
"Lorand Gaspar. Espaces poétiques", Le Livre des Questions, n°3-4, Printemps 1996, Dossier consacré à l'auteur. 5 clichés.
L'Impression du voyage. Chine-arabies. Lorand Gaspar. Victor Segalen. Exposition Galerie de la BPI. 5 juin-16 septembre 1996. Centre Georges Pompidou. 35 clichés.
Arabie heureuse et autres journaux de voyage. - Paris : Deyrolle Éditeur, 1997. Couv. ill. d'une photographie.
Carnets de Jérusalem. Textes & Photographies. - Cognac : Aux Éditions Le Temps qu'il fait, 1997. 16 clichés en noir (en hors-texte) plus un en coul. en première de couverture.
Gravure rupestre. Poèmes de Matyas Varga. Nantes, 1998. 5 clichés accompagnant le texte de l'auteur hongrois.
Réflexions de Lorand Gaspar sur la photographie
"L'image produite par les hommes...", In : Lorand Gaspar. Collections Musée Niepce. 16 juin-10 septembre 1989. Châlons-sur-Saône.
"Note sur la photographie", In : "Champs magnétiques", Poésie 92, n°44, octobre 1992, p. 77-78.